· 

Au coeur des émotions de l'enfant, Isabelle Filliozat - Partie 2 : la vie est motion

La vie est motion : la vie c'est le mouvement, l'émotion c'est le mouvement de la vie en soi.

Nous sommes des êtres sensibles et remplis d'émotions. Une émotion, c'est le mouvement de la vie en soi, c'est un mouvement qui part de l'intérieur de nous et qui s'exprime à l'extérieur. Nous ressentons tous (ou presque) des émotions à chaque situation vécue, et elles nous apportent quelque chose. La peur nous protège d'un danger potentiel et nous aide à faire le nécessaire pour être prêt, la colère nous permet de poser des limites et de défendre qui on est, etc...

 

Lorsqu'on exprime nos émotions, c'est par le corps ; on pleure, on crie, ou tremble, on rit. Tout ça permet au corps de relâcher les tensions subies suite à une forte émotion.

 

En tant qu'adultes, nous avons plus d'outils qui nous permettent de contrôler ces excès d'énergie et de relâcher la tension différemment. Les enfants, eux, ne possèdent pas tous ces outils, et c'est normal qu'ils pleurent, qu'ils crient. Ils en ont besoin.

 

Libérer ses émotions permet d'avoir une meilleure santé psychique.

Un enfant qui exprime une émotion, qui nous raconte quelque chose en "Je", parle de lui, il exprime ce qu'il ressent au fond de lui, ce qu'il vit.

Si nous lui parlons d'autre chose, il va croire qu'il n'est pas important, qu'il n'a pas le droit de ressentir ce qu'il ressent.

 

Par exemple, un enfant peut dire "J'ai eu très peur quand je suis tombé de la chaise."

Généralement, on a envie de répondre "C'est rien, t'as eu plus de peur que de mal." ou encore "Mais c'est bon tu n'as rien.".

 

Lorsqu'on fait ça, on lui envoie le message qu'il a tord d'avoir peur, qu'il n'a pas de raison de ressentir cette émotion. Au fur et à mesure d'expériences similaires, l'enfant va comprendre qu'il ne sert à rien d'exprimer ses émotions, qu'elles ne valent rien et qu'il ne vaut rien. Il va les réprimer et ça va créer en lui des frustrations, des tensions, et plus tard des troubles plus ou moins importants. Il peut ne plus rien ressentir en effaçant la conscience de ce qu'il éprouve réellement.

 

Ce qu'on peut faire dans cet exemple, c'est répondre "Tu as eu peur de te faire mal ?" ou "Tu as eu très peur ?".

 

Ainsi, on écoute son émotion, on l'accueille et on lui montre qu'il existe, que ses sentiments sont légitimes. On l'aide à se sentir lui-même, à se construire.

 

L'expérience du Marshmallow - Walter Mischel

 

Selon cette expérience de Walter Mischel, savoir résister à une impulsion est très important pour l'avenir. L'aptitude à gérer la frustration, à différer une satisfaction, est essentiel à la capacité au bonheur, à la réalisation de ses projets et dans les relations aux autres.

La frustration

Trop de frustration peut traumatiser, mais elle reste nécessaire et aide à grandir.

 

Les enfants ont besoin de frustration et ont besoin de l'exprimer ; elle peut s'exprimer par la colère notamment.

Cependant, il ne s'agit pas de dire oui à tout, le refus est nécessaire et structurant.

 

Pour accompagner un enfant dans le vécu de sa frustration, il s'agit d'écouter sa colère, son émotion, et de l'aider à l'exprimer sainement.

Le fond du message

Le message passé par l'enfant peut être déplacé et prendre une autre forme, ne pas être compréhensible directement.

 

Par exemple, lorsqu'un enfant se met en colère contre un autre pour un jouet qu'il veut, cela peut traduire un besoin d'attention de la part de l'adulte.

 

Un enfant qui pleure "pour un rien" peut être simplement un moyen pour libérer des tensions accumulées, des émotions bloquées. L'enfant trouve un prétexte pour faire sortir son émotion. Dans ce cas, on peut rester présent pour l'enfant, le prendre dans nos bras et le laisser pleurer, le laisser exprimer ce qu'il ressent.

La dissimulation des émotions

Lorsqu'une émotion est réprimée par l'adulte à plusieurs reprises, l'enfant comprend qu'il ne doit plus la montrer, que ça n'est pas ce qu'il est attendu de lui. Alors, il apprend à refouler ses émotions et à les dissimuler. Mais ce au prix de souffrances internes parfois inconscientes. En faisant cela, ils mettent un masque sur leurs ressentis et éprouveront des difficultés plus tard à leur faire confiance, à les écouter.

 

Nous adultes, ne montrons pas facilement nos émotions, car ça ne semble pas "normal" dans notre société. On se sent souvent seul à vivre nos émotions, on a l'impression que personne d'autre ne les vit autour de nous. Alors on se pense nul, on se juge négativement, et on a une mauvaise estime de nous. On réprime nos émotions car "elles sont mauvaises".

Sauf qu'à force de les dissimuler, elles s'accumulent en nous et finissent par exploser à un moment donné. C'est ainsi que peuvent naître des violences, des disputes, des bagarres.

 

On peut éviter cette explosion en acceptant nos émotions, en apprenant à vivre avec, en mettant des mots dessus.

Pour les enfants c'est pareil, il faut les accompagner dans la reconnaissance de leurs émotions en les verbalisant. Le fait de les dire les apaise et permet à l'enfant d'évacuer la tension, de comprendre que ce qu'il se passe en lui est normal et humain.

 

Lorsqu'un enfant boude, il veut faire comprendre que sa souffrance n'a pas été entendue par l'adulte.

Dans ces cas là, il est inutile d'insister avec des phrases comme "Allez va bouder ailleurs je n'aime pas les enfants qui boudent.", ça ne va que l'enfoncer dans sa souffrance.

On peut par contre l'aider à l'exprimer, essayer de comprendre ce qu'il se passe en lui, en lui disant par exemple "Je vois que tu es triste parce que je n'ai pas regardé ce que tu as crée, ...".

 

On peut aussi aider l'enfant à exprimer ses émotions en lui demandant ce qu'il ressent, ce qu'il se passe. En demandant "Pourquoi", on force l'enfant à donner une raison, qu'il ne connaît pas toujours ; on cherche à trouver une solution, alors qu'il a peut-être juste besoin d'être écouté dans son émotion.

Par exemple, une fois un enfant est venu me voir en me disant "Machin m'a poussé mais il n'a pas fait exprès." Je lui ai demandé "Et qu'est-ce que tu a ressenti ?", il m'a répondu "Ca m'a fait mal mais ça va mieux !", et il est reparti. Il avait juste besoin d'exprimer quelque chose, de dire son vécu.

 

Bien sûr, si vraiment on voit qu'il y a besoin d'intervenir, on le fait, il ne s'agit pas de laisser les enfants résoudre des problèmes qu'ils ne peuvent pas résoudre seuls !

 

Les étapes de l'accompagnement émotionnel

Quand vous êtes agacé par tout

Et oui, même si parfois on a l'impression d'avoir des super pouvoirs (oui oui ! Une patience extraordinaire, une gestion du stress incroyable, une adaptabilité hors normes, l'animation nous dévoile des qualités exceptionnelles !), on reste humains tout de même.

 

Ça nous arrive à tous d'être fatigué. Et quand on est fatigué, en général, on est vite irritable, on a moins de patience, un rien nous énerve... Et avec les enfants ça peut vite être compliqué !

On a aussi nos soucis personnels, notre histoire de vie, un contexte particulier, ... Tellement de paramètres qui peuvent nous faire sortir de nous et avoir les nerfs à bout.

 

Dans ces cas là, il faut savoir reconnaître qu'on n'est pas dans notre assiette, qu'on est fatigué, et le formuler aux enfants afin qu'ils comprennent pourquoi nous agissons ainsi. Leur préciser que ça n'est pas leur comportement qui ne va pas, mais que nos limites sont atteintes et qu'on a besoin de plus de calme.

Généralement, les enfants comprennent bien et respectent la demande.

Écrire commentaire

Commentaires: 0